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Cabinet Bouchara
Pour être déposé à titre de marque, le signe choisi doit, en plus d’être licite et distinctif, être disponible. En effet, l’article L.711-3 du Code de la Propriété Intellectuelle énonce que « ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France ».
L’exigence de disponibilité pour garantir la fonction d’identification d’origine de la marque
Cette condition de validité découle d’une des fonctions essentielles de la marque, à savoir l’identification de l’origine des produits et services qu’elle désigne (CJCE, aujourd’hui CJUE, 22 juin 1976, C-119/75, Terrapin).
Une marque doit en effet permettre au consommateur de rattacher les produits et services visés à une entité spécifique et de les distinguer de ceux de ses concurrents. A défaut, le jeu de la concurrence serait faussé.
Or, la présence de deux marques identiques ou similaires pour désigner des produits et services analogues entraînera nécessairement un risque de confusion dans l’esprit du public qui sera susceptible de leur attribuer une origine commune alors qu’ils émanent d’entreprises distinctes.
Lors de l’examen d’une demande de marque, la plupart des Offices de Propriété Intellectuelle (notamment l’INPI, l’EUIPO et l’OMPI) ne vérifient pas la disponibilité du signe et examinent uniquement les conditions de licéité et de distinctivité.
La disponibilité du signe pourra être contestée par les tiers à compter de la date de publication de la demande de marque.
Si la marque n’est pas encore enregistrée, les tiers pourront former opposition à l’encontre de la demande dans les deux mois(devant l’INPI) ou trois mois (devant l’EUIPO) suivant la publication du dépôt (Article L. 712-4 et R. 712-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, Article 46 du Règlement sur la marque de l’Union européenne).
Il s’agit d’une procédure administrative intentée devant les Offices de Propriété Intellectuelle.
Il appartient au déposant de s’assurer qu’il n’existe pas de droits antérieurs détenus par des tiers susceptibles de faire obstacle à son dépôt de marque.
C’est pourquoi il est impératif d’effectuer une recherche d’antériorités approfondie préalablement au dépôt.
Une telle recherche permet d’identifier des droits antérieurs susceptibles de constituer des obstacles potentiels ou dépôt de marque, à savoir des signes identiques ou similaires (anagrammes ou inversions de mots, signes ayant une architecture commune etc..) identifiants des activités identiques ou similaires.
Une fois la marque enregistrée, les tiers pourront toujours intenter une action en nullité à l’encontre de la marque contestée, soit par la voie administrative devant les Offices, soit par la voie judiciaire devant les Tribunaux.
« ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France ».
Les antériorités susceptibles de remettre en cause la disponibilité du signe
Les droits antérieurs pouvant être invoqués dans le cadre de ces actions sont les suivants (Article L.711-3 du Code de la Propriété Intellectuelle):
- Une marque antérieure ;
- Une dénomination ou raison sociale ;
- Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n’est pas seulement locale ;
- Une indication géographique enregistrée ;
- Des droits d’auteur ;
- Des droits résultant d’un dessin ou modèle protégé ;
- Un droit de la personnalité d’un tiers, notamment à son nom patronymique, à son pseudonyme ou à son image ;
- Le nom, l’image ou la renommée d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public de coopération intercommunale ;
- Le nom d’une entité publique, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.
L’antériorité peut être établie dès lors que le droit invoqué a été déposé ou divulgué avant le dépôt de marque contesté.
Si la question de la preuve de l’antériorité ne se pose pas lorsque le droit invoqué a fait l’objet d’un dépôt (ex. marque) ou d’une immatriculation (ex. dénomination sociale), elle peut s’avérer complexe en matière de droit d’auteur.
En effet, une œuvre de l’esprit est protégeable au titre du droit d’auteur du seul fait de sa création (Article L. 111-1 du code de la Propriété Intellectuelle).
L’acquisition de ce droit n’est donc soumise à aucun formalisme particulier.
Il appartiendra à l’auteur de prouver que son œuvre a été divulguée antérieurement au dépôt de la marque contestée.
Enfin, pour être invoqué, le droit antérieur doit être valable sur le territoire de dépôt de la marque contestée.
La démonstration d’un risque de confusion au regard du principe de spécialité
Pour pouvoir contester la disponibilité d’une marque, encore faut-il pouvoir caractériser l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public entre le droit antérieur invoqué et la marque contestée.
En vertu du principe de spécialité, la protection d’une marque n’est pas absolue et se limite aux produits et services qu’elle identifie (Voir notamment CA Aix-en-Provence, 30 mars 2017, n°14/10911).
Ce principe rend donc le signe indisponible dans le secteur économique visé par le droit antérieur mais le laisse appropriable pour les autres secteurs.
Ainsi, dans la plupart des cas, quand bien même deux signes seraient parfaitement identiques, le risque de confusion pourra être écarté si les signes sont exploités pour des produits et services différents, le public n’étant pas fondé à leur attribuer une origine commune en pareil cas.
Pour remettre en cause la disponibilité d’une marque, le demandeur devra démontrer l’existence d’un risque de confusion notamment s’il invoque à l’appui de sa demande les droits suivants :
- Une marque
Le risque de confusion s’apprécie de manière globale au regard des signes et des produits et services en cause (Voir notamment Cass.com, 25 mars 2014 n° 13-690).
Il convient de prendre en compte l’impression d’ensemble produite par les marques (CJCE, aujourd’hui CJUE, 11 novembre 1997, Aff. C-251/95, Sabel C/ Puma).
Ainsi, « un faible degré de similitude entre les produits ou services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement » (CJCE, 29 septembre 1998, Canon Kabushiki Kaisha C/ Metro-Goldwyn-Mayer).
Particularités de la marque de renommée
Selon le principe de spécialité, même si les signes sont identiques, en présence de produits et services différents, les marques ne seront pas considérées comme similaires de sorte que la validité de la marque ultérieure ne pourra pas être contestée sur ce fondement.
Ce principe de base peut toutefois être tempéré lorsque la marque antérieure est une marque de renommée, qui bénéficie d’une protection élargie au-delà des produits et services pour lesquels elle a été enregistrée.
Par exception, une marque de renommée pourra être invoquée en tout état de cause, quand bien même ses produits et services ne présenteraient aucun lien avec ceux désignés par la marque contestée (Article L. 713-3 du Code de la Propriété Intellectuelle).
Il appartiendra au titulaire d’une telle marque de démontrer que par son usage intensif et bien souvent ancien, une grande partie du public en a connaissance.
Particularités de la marque notoire
Contrairement à la marque de renommée, la marque notoire, non enregistrée, n’échappe pas au principe de spécialité et pourra être invoquée à l’encontre d’une marque postérieure seulement si les produits et services en cause sont identiques (Article 6 bis de la Convention de Paris).
- Un nom de domaine
Le nom de domaine permet d’identifier un site internet.
Il peut constituer une antériorité justifiant l’annulation d’une marque sous réserve d’avoir été exploité avant le dépôt de la marque.
Le risque de confusion pourra être établi si la marque est composée d’un signe similaire ou identique au radical du nom de domaine, qui doit nécessairement être distinctif à l’égard des produits ou services qui font l’objet de l’activité du site Internet.
La Cour d’appel a en effet annulé la marque « Pilotimmo » qui désignait les services d’affaires immobilières dès lors que ce dépôt portait atteinte aux noms de domaine « pilotimmo.com » et « pilotimmo.edf.fr » exploités antérieurement au dépôt de la marque pour des activités similaires (CA Aix en Provence 4 juillet 2019 n°17/01088).
Le nom domaine doit par ailleurs être exploité en France.
Cette exploitation nationale est établie dès lors que les activités du site Internet sont dirigées vers la clientèle française (Cass. Com. 11 janvier 2005, n° 02-18381).
- une dénomination ou raison sociale
La dénomination sociale sert à individualiser une personne morale dans le cadre de ses activités.
Elle peut constituer une antériorité opposable à une marque dès l’immatriculation de la société et sous réserve de démontrer que la dénomination sociale est exploitée pour des activités identiques et/ou similaires aux produits et services identifiés par la marque contestée.
La Cour de cassation a ainsi pu écarter le risque de confusion entre la marque « Face sud – escalade – canyoning – via ferrata » déposée notamment pour des services d’activités de loisirs et la dénomination sociale « Face sud » d’une société spécialisée dans les travaux en hauteur (Cass.Com. 25 janvier 2017 n°15-20.151).
- un nom commercial, une enseigne
Le nom commercial/l’enseigne permet à une clientèle d’identifier le fonds de commerce exploité.
Les règles sont les mêmes que pour la dénomination sociale.
Toutefois, l’antériorité doit être connue sur l’ensemble du territoire national au moment du dépôt pour être valablement opposable à l’enregistrement de la marque.
Si le nom commercial/l’enseigne n’a qu’un rayonnement local, il ne pourra valablement être invoqué.
La recherche d’antériorités préalable à tout dépôt de marque, doit être effectuée de manière systématique.
En effet, il est très risqué d’adopter un signe portant atteinte à des droits antérieurs.
Pour appréhender et analyser ce risque, il existe plusieurs types de recherches d’antériorités qui peuvent porter sur l’existence de marques identiques, l’existence de marques similaires (dont les similitudes seront appréciées d’un point de vue phonétique, figuratif, etc.), les dénominations sociales et les noms de domaine.
Dans le cadre d’une recherche analogique, toutes les variantes sont recherchées afin de déterminer, de manière précise, s’il existe un risque de confusion avec une marque antérieure.
Le plus souvent, ce sont des marques similaires qui sont opposées à un dépôt et non des marques identiques.
Cette recherche de similitudes est donc essentielle à effectuer, de préférence par l’intermédiaire d’un professionnel, Conseil en Propriété Industrielle ou Avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle.
Une recherche d’antériorités approfondie permet de détecter l’ensemble des droits antérieurs susceptibles de constituer un obstacle au dépôt de marque (notamment les marques, noms de domaine et dénominations sociales), et d’apprécier le risque d’opposition de tiers.
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