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Opposition
L’opposition est un acte par lequel une personne physique ou morale demande à l’organisme en charge de la délivrance du titre concerné (par exemple, l’INPI pour une demande de marque française et l’EUIPO pour une demande de marque de l’union européenne), le rejet de la demande d’enregistrement au motif qu’elle porte atteinte à ses droits antérieurs.
L’entrée en vigueur du « Paquet Marques » à la suite du Règlement (UE) n° 2017/1001 du 14 juin 2017 et de la transposition de la Directive (UE) n°2015/2436) par la loi PACTE n°2019-486 du 22 mai 2019 et l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019, a profondément modifié la procédure d’opposition de marque devant l’INPI.
Droits antérieurs opposables dans le cadre d’une opposition
L’opposition formée à l’encontre d’une demande de marque déposée en France, ou désignation française d’un enregistrement international, peut désormais être fondée sur un ou plusieurs droits antérieurs sous réserve qu’ils appartiennent au même titulaire.
En effet, l’article L.712-4 du Code de la propriété intellectuelle prévoit que peuvent être opposés à une demande de marque postérieure :
- Une marque antérieure française ou de l’Union européenne ;
- Une marque de renommée ;
- Une marque notoire, à savoir un signe non enregistré bénéficiant d’une importante notoriété au sens de l’article 6 de la Convention de Paris ;
- Une dénomination sociale ;
- Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, sous réserve que leur portée ne soit pas seulement locale ;
- Le nom, la renommée ou l’image d’une collectivité territoriale ;
- Le nom d’une entité publique ;
- Une indication géographique (IG).
Devant l’EUIPO, il est possible d’opposer à une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne :
- Une marque de l’Union européenne antérieure ;
- Une marque nationale antérieure, enregistrée auprès d’un Office d’un pays de l’Union européenne (ex : une marque nationale française ; une marque nationale allemande ; une marque nationale espagnole etc) ;
- Une marque de renommée, nationale ou de l’Union européenne ;
- Une marque notoire ;
- Un signe non enregistré, exploité dans le commerce et ayant une portée pas seulement locale, à condition que ces signes soient considérés comme opposables par le droit national concerné (ex : une dénomination sociale en France) ;
- Une appellation d’origine ou indication géographique.
Déroulement de la procédure
La nouvelle procédure d’opposition auprès de l’INPI s’apparente à celle en vigueur devant l’EUIPO :
Première étape, purement formelle : dans un délai de deux mois suivant la publication de la demande d’enregistrement en France (3 mois à compter de la publication de la demande d’enregistrement déposée en Union européenne), tout tiers peut s’y opposer devant l’Office compétent.
Il faut ainsi :
- Identifier le ou les droits antérieurs invoqués et le ou les justificatifs y afférents : cela comprend par exemple le numéro de la marque antérieure invoquée, mais également les produit(s) et service(s) invoqués par l’opposant (seule une partie des produit(s) et service(s) pouvant être invoqués) ;
- Identifier la demande d’enregistrement contestée ;
- Identifier le fondement invoqué : reproduction à l’identique du droit antérieur pour les mêmes produits et services ? Ou imitation du droit antérieur créant un risque de confusion dans l’esprit du public ?
- Paiement de la taxe d’opposition officielle.
Seconde étape: l’opposant dispose d’un mois pour compléter l’opposition par le dépôt de ses arguments, explicitant par exemple en quoi, selon lui, il existerait un risque de confusion.
Troisième étape : phase contradictoire pendant laquelle le déposant de la demande d’enregistrement contestée est invité à répondre à l’opposant par des observations en réponse.
Il peut y avoir plusieurs échanges d’observations entre les parties (jusqu’à 3 par partie devant l’INPI), et le déposant peut également solliciter des preuves de l’exploitation de la marque antérieure invoquée lorsque celle-ci était enregistrée depuis plus de cinq ans au jour de la demande.
Dans une telle hypothèse, si l’opposant échoue à démontrer un usage sérieux de la marque qu’il oppose, son opposition sera considérée comme irrecevable et sera en conséquence rejetée.
Quatrième étape, facultative : présentation d’observations orales dans le cadre d’une audition fixée par l’INPI, à la demande d’une des parties.
Si aucune partie ne sollicite d’audition, la phase d’instruction est clôturée une fois que les parties ont épuisé leur droit de soumettre des observations, ou ont raté un délai pour répondre.
Devant l’EUIPO, il n’existe pas de possibilité de solliciter des observations orales.
Dernière étape: une fois la phase contradictoire clôturée par l’Office, celui-ci rendra sa décision.
En France, le Directeur général de l’INPI est obligé de rendre sa décision au plus tard dans les 3 mois à compter de la clôture de la phase contradictoire.
En Union européenne, l’EUIPO n’est pas enfermée dans un délai pour rendre sa décision (6 à 9 mois en pratique, parfois plus).
Focus sur l’appréciation du risque de confusion
La décision de l’Office compétent sera motivée sur l’existence, ou non, d’un risque de confusion (ou l’atteinte à la marque de renommée le cas échéant) entre le droit antérieur invoqué et la demande d’enregistrement contestée.
Il appartiendra à l’Office de démontrer le risque que le public puisse croire, à tort, que les produit(s) et/ou service(s) contestés proviennent de la même entreprise, ou d’entreprises économiquement liées, que celle de l’opposant. Il peut également être caractérisé en cas de risque d’association.
Il ressort de la jurisprudence de la CJUE (CJUE, 29 sept. 1998, Canon, C-39/97) que l’analyse du risque de confusion résulte de la prise en compte des éléments suivants :
- Degré d’attention des consommateurs ;
- Degré de similitudes des produit(s) et/ou service(s) désignés ;
- Degré de similitude des signes en conflit et tout autre facteur (dont la renommée et/ou le le degré de distinctivité de la marque antérieure).
Le risque de confusion est ainsi établi lorsque les produit(s) et/ou service(s) visés sont identiques ou, à tout le moins, similaires, et que les signes présentent des similitudes visuelles, phonétiques et/ou conceptuelles.
Cette comparaison est également effectuée dans le cadre de l’action en nullité et de l’action en contrefaçon de marque.
Afin d’anticiper le risque juridique et pratique de réaction des tiers à l’encontre de votre dépôt de marque, il est recommandé d’effectuer une recherche d’antériorités parmi les droits antérieurs pouvant y faire obstacle (marques, dénominations sociales, noms de domaine etc…).
Une marque est un actif majeur dans la vie des affaires et doit donc être protégée et défendue.
Face à la multiplication des dépôts frauduleux et au développement de la contrefaçon sur Internet, il est recommandé de se faire accompagner par un avocat spécialisé en propriété intellectuelle (appréciation des chances de succès dans le cadre d’une procédure, analyse de l’opportunité d’une résolution amiable etc…).
Point sur les délais dans lesquels former opposition
Devant l’INPI, le délai pour s’opposer à une demande de marque française est de 2 mois à compter de la publication de la demande d’enregistrement. Devant l’EUIPO, le délai pour s’opposer à une demande de marque de l’Union européenne est de 3 mois à compter de la demande d’enregistrement.
Point jurisprudence
Les signes DOCTOLIB et DOCTOTEL ont été considérés comme similaires par l’INPI pour les motifs suivants (INPI, 25 octobre 2021, Opposition n°21-1481):
- terme d’attaque commun DOCTO ;
- physionomies proches ;
- sonorités quasi identiques ;
- le suffixe « TEL » de la demande contestée est faiblement distinctif (abréviation du mot « téléphone ») et ne constitue donc pas une différence suffisante pour écarter le risque de confusion.
L’opposant s’était fondé sur sa dénomination sociale antérieure DOCTOLIB et sur la renommée de sa marque française DOCTOLIB.
L’opposition fondée sur la dénomination sociale ayant jugé parfaitement justifiée par l’INPI, l’Institut n’a pas statuer sur l’atteinte à la renommée et a rejeté la demande de marque DOCTOTEL (INPI, 25 octobre 2021, décision n°21-1481).
Le Cabinet Bouchara vous accompagne notamment dans :
- La conduite de recherches d’antériorités afin d’identifier les risques les plus importants et/ou de tenter de minimiser les risques du dépôt ;
- Les formalités de dépôt de marque (rédaction du libellé des classes de produit(s) et/ou service(s), analyse du caractère distinctif du signe etc…) ;
- La surveillance de vos signes distinctifs afin d’identifier tout nouveau dépôt identique ou similaire qui serait susceptible de leur porter atteinte ;
- La conduite de négociations avec la partie adverse pour tenter d’aboutir à un accord le cas échéant (limitation du libellé des produit(s) et/ou service(s), signature d’une lettre d’engagement, accord de coexistence etc…) ;
- La protection et la défense de vos actifs de propriété intellectuelle devant les Offices et les Tribunaux (opposition, action en nullité, action en déchéance pour défaut d’exploitation ou pour perte de caractère distinctif, saisie-contrefaçon, action en contrefaçon, action en concurrence déloyale etc…) ;
- La préparation des dossiers de preuves d’usage dans le cadre d’actions en déchéance.